Sur mes étagères : No et moi de Delphine de Vigan

No et moi, Delphine de Vigan


Résumé :


" Adolescente surdouée, Lou Bertignac rêve d’amour, observe les gens, collectionne les mots, multiplie les expériences domestiques et les théories fantaisistes. Jusqu’au jour où elle rencontre No, une jeune fille à peine plus âgée qu’elle. No, ses vêtements sales, son visage fatigué, No dont la solitude et l’errance questionnent le monde. Pour la sauver, Lou se lance alors dans une expérience de grande envergure menée contre le destin.
Mais nul n’est à l’abri... "




J’ai lu No et moi pour la première fois au lycée. J’avais vraiment adoré, mais, comme beaucoup de romans que j’ai lus il y a des années, c’était à peu près tout ce dont je me souvenais. C’est pourquoi j’ai décidé, avec tout de même un peu d’appréhension à l’idée d’être déçu, de le relire. Et à mon grand soulagement, j’ai éprouvé autant de plaisir à redécouvrir ce roman que j'en avais eu lors de ma première lecture.


No et moi, c’est d’abord l’histoire de Lou, la narratrice de ce roman à la première personne, une adolescente surdouée qui a parfois un peu de mal à trouver sa place dans ce monde si étrange. Je me souviens qu’adolescente, je m’étais tout de suite identifiée à elle. Sans être surdouée, ce n’est pas toujours facile de s’intégrer quand on ne fonctionne pas exactement comme les autres. Lou est touchante, car derrière cet esprit cartésien qui essaye de décortiquer le monde qui l'entoure se cache une adolescente sensible au cœur immense.

" Depuis toute la vie je me suis toujours sentie en dehors, où que je sois, en dehors de l'image, de la conversation, en décalage, comme si j'étais seule à entendre des bruits ou des paroles que les autres ne perçoivent pas, et sourde aux mots qu'ils semblent entendre, comme si j'étais hors du cadre, de l'autre côté d'une vitre immense et invisible."

Mais No et moi, c’est aussi l’histoire de tout l’entourage de Lou. Celle de ses parents qui se remettent tant bien que mal de la perte d’un enfant, mais également celle de Lucas, son camarade de classe que ses parents laissent livré à lui-même. Sans oublier celle de Nolwen, No, une jeune fille SDF que Lou rencontre par hasard à la gare en allant regarder le va-et-vient des voyageurs. No qui est à peine plus âgé qu’elle, mais qui a déjà perdu tous ses rêves. No qui ne croit plus en rien. No dont l’errance et la souffrance bousculent toutes les règles auxquelles croyait Lou. Lou qui n'aura alors de cesse de l’aider pour remettre son monde à l’endroit. Mais le monde ne tourne pas toujours rond et tout ce qui est cassé ne peut pas être réparé. C’est la dure vérité que va devoir apprendre Lou pour quitter l’enfance et devenir une adulte.



" On est capable d'envoyer des avions supersoniques et des fusées dans l'espace, d'identifier un criminel à partir d'un cheveu ou d'une minuscule particule de peau , de créer une tomate qui reste trois semaines au réfrigérateur sans prendre une ride , de faire tenir dans une puce microscopique des milliards d'informations . On est capable de laisser mourir des gens dans la rue."



Sans misérabilisme, avec un regard qui a l'innocence de l'enfance, Delphine de Vigan nous parle de la difficulté de grandir, d’être différent, de la violence invisible, celle de l’absence, de l’indifférence et des non-dits. Mais elle nous raconte aussi l’histoire d’une amitié qui transcende les frontières, qui réunit des univers qui ne sont pas censés se côtoyer, qui rapprochent l’adolescente précoce des beaux quartiers, le jeune homme rebelle en échec scolaire, et la fille des rues, du combat d'une enfant qui ne peut accepter qu'on puisse laisser quelqu'un sombrer sans rien faire...

“ Avant de rencontrer No, je croyais que la violence était dans les cris, les coups, la guerre et le sang. Maintenant je sais que la violence est aussi dans le silence, qu’elle est parfois invisible à l’œil nu. La violence est ce temps qui recouvre les blessures, l’enchaînement irréductible des jours, cet impossible retour en arrière. La violence est ce qui nous échappe, elle se tait, ne se montre pas, la violence es ce qui ne trouve pas d’explication, ce qui à jamais restera opaque. “

Un magnifique roman qui nous rappelle l'époque où nous aussi on croyait que toute était possible, qui nous donne envie de faire comme Lou et d'essayer de faire bouger les choses, qui nous dit que la vraie violence c'est l'indifférence et que parfois, juste un regard, un mot gentil, c'est déjà beaucoup.

"Et si c'était ça le bonheur, pas même un rêve, pas même une promesse, juste l'instant."

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